20 décembre 2012

"A la française": Baer en caricature de lui-même

"Alors c'est ça le truc? J'ai pas d'idée alors je vais me déguiser en grosse dame, histoire d'être sûr de recueillir deux-trois rires faciles?!" Et que croyez-vous qu'il fit? Il se déguisa en vieille dame, pardi. Un court extrait faisant figure, me semble-t-il, de résumé assez parfait pour la pièce A la française, jouée et écrite par Edouard Baer, au théâtre Marigny.
Tout à jeter, alors? Non, bien sûr que non. C'est Edouard Baer qui est à la baguette, et le garçon a du talent. On le retrouve tel qu'on le connaît. Joyeusement foutraque. Donc avec des répliques bien senties et un jeu excellent mais, car il y a forcément un mais, avec aussi une légère tendance à éclipser ses petits camarades - ils sont neuf, avec lui, sur scène - et, plus grave encore, à venir masquer les trop nombreuses facilités d'écriture de la pièce.
 
Tendance recyclage
 
Pour qui a suivi un peu la carrière de Baer, on retrouve ainsi quelques bouts de ses sketchs de la glorieuse époque Canal. Et, à y bien réfléchir, le scénario a quelques similitudes, aussi, avec son film, La Bostella. Baer incarne... Edouard Baer, lequel est chargé, par le ministère des Affaires étrangères, d'organiser un spectacle pour la soirée du G20, qui se tient à Paris. Voilà trois mois qu'on l'a contacté pour cela, avec comme thème, très vague, de donner sa vision de la France. Procrastination oblige, Baer n'en a pas foutu une ramée. Et, à 24h du G20, un représentant du ministère - un bien pauvre Lionel Abelanski, guère servi par l'inconsistance de son texte - vient s'enquérir des avancées du spectacle. La pièce commence ici. Baer n'a plus le choix. Il doit s'y mettre, et rameute tous ceux qui traînent autour de lui pour organiser à la hâte cette foutue soirée. Mais comment s’y prendre ? Qu’est-ce que la France ? Que raconter ? Comment la représenter ? C’est tout l’enjeu du brainstorming qui s’installe (tempête dans le cerveau, en bon français), deux heures durant.
 
Entre les rires, le temps est long
 
Caricature assumée de lui-même, Edouard Baer est comme un poisson dans l'eau dans ce foutoir. Il surnage grâce à des envolées lyriques intéressantes, qui ont fait sa réputation, et qui sauvent l'ensemble. Qui déclenchent même, assez régulièrement, quelques rires francs.
Mais tout est dans le "assez régulièrement"... L'ennui, c'est qu'entre ces rires le temps est souvent long. Les dialogues venant conclure les différentes scènes sont parfois d'une pauvreté affligeante, et le tableau final est carrément mauvais. Ballot puisque c'est la dernière impression laissée...
Certaines scènes sont assez inexplicablement chantées. Ce qui n'apporte strictement rien, et a même plutôt tendance à venir casser le rythme. D'autant que, à part un joli brin de voix sur une chanson de Piaf de la part de Léa Drucker, les textes chantés sont franchement plats. Si quelqu'un a compris l'intérêt de ces insertions de type "comédie musicale" dans la pièce, qu'il ne se gêne pas pour me dire...
 
Faute avouée est à moitié pardonnée
 
Restent, malgré tout, les rires que j'évoquais. Ils masquent certes assez mal le vide autour, mais ont toutefois le mérite d'être là. On retient de "A la française" un foutoir franchouillard plutôt sympathique. Et, pour qui voudra aller plus loin dans l'analyse psychologique, une charmante mise en abyme d'un Edouard Baer se moquant gentiment des travers qu'on lui prête: "un gars talentueux, mais un poil paresseux et brouillon" (c'est la critique du Figaro qui, très justement, utilise ces deux termes). Baer semble en être parfaitement conscient. Et comme faute avouée est à moitié pardonnée, on peut envisager sans reculer d'aller voir "A la française"... mais à moitié prix alors.
 
 
 
A la française
De et avec Edouard Baer
Théâtre Marigny
Carré Marigny
Paris VIIIème
Jusqu'au 26 janvier 2013

1 commentaire:

Anonyme a dit…

"Éclipse ses comparses de jeu ?"
Je vous trouve bien gentil JnoCau...

J'ai trouvé pour ma part qu'il n'eclipsait rien de rayonnant. En dehors de la servante, le reste est assez pauvre... lea drucker ne s'en sort pas trop mal, même dans le chant.
Mais j'ai été effaré par Leila behkti et Vincent Lacoste. l'impression de voir deux collégiens faire leur spectacle de fin d'année. Aucune présence (pour elle) une diction digne de la télé réalité (pour lui) un jeu inégal bercé entre la seule écoute de soi et la mollesse corporelle. Baer n'éclipse pas les autres. il est le seul à être sur scène.
c'est tout le problème des jeunes starlettes issues du ciné. et qui oublient que jouer sur des planches, c'est un autre métier...