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Le film de l'année est signé Alain Resnais. |
Meilleur par rapport à qui, par rapport à quoi? Et puis selon quels critères, surtout? Partons du principe que tout cela est forcément subjectif. Et qu'il y a là, bien sûr, un petit côté maître d'école un peu ridicule. J'en conviens.
Mais j'ai toujours adoré les statistiques, les classements et les bilans. Plus jeune, on m'offrait pour mon anniversaire ou Noël les "Année du cyclisme" et "Année du football". C'était pratique pour qui voulait me faire plaisir: pas besoin de trop se gratter la tête. C'est devenu plus compliqué, désormais. Mes bilans annuels, je les fais moi-même...
Attention. Vous être prêts à être abreuvés de chiffres? Alors, c'est parti !!
J'ai vu cette année 32 films. 12 français et, donc, 20 étrangers. J'ai donné à 17 d'entre eux une note supérieure à 10/20 (dans un panel allant de 6 à 17). Le tout pour une moyenne générale à 10,5/20.
Encore plus de détails? Vous êtes de grands fous, je vois, et j'aime ça.
6 films ont eu droit à la critique "excellent"
8 à la mention "à voir"
8 à un simple "moyen"
et 10 à un lapidaire "on peut s'en passer".
Et voici donc, sous vos yeux ébahis, mon top 10 2012. Un top 10 qui, soit dit en passant, finit avec un très honorable 14,5/20 de moyenne. Fait notable: on trouve 5 films français dans le lot. Pas si mal.
1/ Vous n'avez encore rien vu. Alain Resnais.
Trop vieux pour faire de grands films, Alain Resnais? C'est mal le connaître. Papy fait de la résistance et prouve que, à 90 ans, on peut continuer à être inventif. Il sert ici une ode au théâtre dans un film qui évite l'écueil de la simple adaptation théâtrale. Une merveille de mise en scène qui fait de la pièce d'Eurydice quelque chose d'ultra moderne. Et, plus important, de cinématographique. Le grand film de l'année.
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Difficile d'égaler le talent de la mise en scène
de Wes Anderson, dans Moonrise Kingdom |
2/ Moonrise Kingdom. Wes Anderson.
L'enfance vue par Wes Anderson. Un film onirique sur l'insouciance de la jeunesse, confrontée au monde des adultes. Sam aime Suzy, qui aime Sam. Les deux sont bien décidés à vivre leur amour - pur, forcément pur - sans se soucier de ce que peuvent bien en penser les autres. Une quête infantile grandiose, empreinte de nostalgie et de romantisme.
Jean Dujardin revient au comique après The Artist. Le tout avec succès. Une gageure car le garçon était attendu au tournant. Et qu'il se coltine ici un film à sketchs qui a d'ordinaire tout du "casse-gueule". Avec son compère Gilles Lellouche il se penche sur le cas du quadra voulant encore jouer au jeunot, dragueur invétéré mais surtout souvent "beauf" attachant. Des rires francs et massifs pour échapper à la morosité ambiante.
4/ Radiostars. Romain Lévy.
Une bande de potes en goguette, menée par un Manu Payet décidément excellent. Quand l'équipe d'un "morning" radio part en tournée dans la France profonde. Un road movie franchouillard frais et divertissant.
5/ J.Edgar. Clint Eastwood.
Un film d'un grand classicisme - Clint Eastwood à la baguette - mais qui pervient à émouvoir en abordant, sobrement, la question d'une homosexualité refoulée. J.Edgar Hoover, tout puissant patron du FBI 48 ans durant, mais montré dans ce qu'il a de plus faible et pitoyable. Une histoire d'amour, forte mais non assumée, avec son numéro 2, Clyde Tolson. Quelques facilités dans le scénario et la mise en scène, mais un très bon di Caprio et une approche tout en finesse des failles qui font la grandeur - et la décadence - des hommes.
6/ Tyrannosaur. Paddy Considine.
Un film anglais, évidemment. Qui d'autre pour exprimer ainsi la rage sociale et le désespoir de tout un pan de la population? Un Peter Mullan exceptionnel endossant le rôle d'un pauvre veuf dans une Glasgow glauque à souhait. Un solitaire bourru, vaguement alcoolisé, qui n'en finit pas de hurler sa misère. Mais qui, aidé par Hannah - une Olivia Colman émouvante de justesse et de finesse, lutte pour canaliser cette haine sous-jacente. Et en sortir le meilleur? Mouais... Essayer en tout cas, ce qui n'est déjà pas si mal.
7/ Le Grand Soir. Benoît Delépine et Gustave Kervern.
Une comédie noire comme le duo Delépine et Kervern a appris à nous en délivrer désormais. La "french touch'" pour aborder la crise, en somme. C'est la merde, certes, mais ce n'est pas une raison pour ne pas en rire. Un duo Poelvoorde-Dupontel qui fait des éclats - ce qui n'était pas gagné d'avance. Et, au final, de quoi réfléchir sur notre sort actuel. Avec, comme mot clé, cette phrase, qui résume tout: "T'aurais pu nous prévenir, papa, que c'était si dur."
8/ Avengers. Joss Whedon.
Des lacunes en matière de super-héros? Pas de panique. Avengers les rassemble tous, depuis Iron Man en passant par Hulk, Thor, Captain America, Black Widow et Hawkeye. De la grosse artillerie hollywoodienne, certes, mais qui parvient à être subtile. Le film est bien écrit - des dialogues parfois très drôles - et les stars qui sont au générique donnent l'impression de jouer ensemble et non l'un contre l'autre, dans une pathétique ambition de tirer la couverture à eux. En soi, déjà à souligner.
9/ Comme des frères. Hugo Gélin.
Des tonnes d'imperfections dans ce premier long-métrage de Hugo Gélin, mais un trio Duvauchel-Demaison-Niney qui s'amuse à l'écran, et nous amuse par la même occasion. Une réflexion douce-amère sur le sens de la vie, au différents âges de la vie. Des dialogues qui font mouche, pour des situations qui, forcément, entrent en résonance avec notre propre vécu. Une jolie surprise.
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Tara Lynne Barr. La révélation.
Son jeu, ses regards, tout est parfait. |
10/ God bless America. Bob Goldwaith.
L’un des fantasmes les mieux partagés au monde, sans doute: se débarrasser de tous les connards qui encombrent nos vies. Sauf que ça ne se fait pas, paraît-il. Qu'à cela ne tienne, Frank, incarné par Joel Murray (petit frère de Bill) se lance dans une chasse aux cons délirante et assez jouissive. Il partage l'affiche avec une Tara Lynne Barr merveilleuse, révélation de l'année.
Un peu de fiel, maintenant, dans ce monde de gentilesse? Oh que oui alors. Mon flop 5 est largement dominé par Bruegel, le moulin et la croix qui, tellement mauvais, aurait presque mérité d'être classé hors concours. Le top "five" du pire de l'année 2012.
1/
Bruegel, le moulin et la croix. Lech Majewski.
L'idée de départ était assez géniale: s'emparer d'un tableau de Bruegel et imaginer la vie de quelques-uns des personnages représentés. Sauf que Lech Majewski signe en réalité un film sans scénario, qui n'a strictement aucun intérêt.
2/
Chroniques sexuelles d'une famille d'aujourd'hui. Jean-Marc Barr.
Le cul, ça marche toujours... Eh non, très cher Jean-Marc Barr. Du rien entouré de scènes de sexe sobres - en clair que des bouts de fesse qui dépassent (la version non censurée était attendue pour la sortie du seul DVD). Vide de sens.
3/
Cosmopolis. David Cronenberg.
C'est l'histoire d'un gars, joué par Robert Pattinson, qui a un problème de prostate asymétrique. C'est surtout l'histoire d'un gars, David Cronenberg, qui prend les spectateurs pour des abrutis.
4/
Dans la maison. François Ozon.
"Il se passe toujours quelque chose dans une maison, et il y a toujours moyen d'entrer". Cette phrase, c’est Claude, le héros narcissique et manipulateur de Dans la maison qui la prononce. Sauf que ce qui est valable pour une habitation l’est visiblement beaucoup moins pour un film. On ne croit pas une seconde à la fable avancée par François Ozon, qu'on a connu plus inspiré.
5/
Les adieux à la reine. Benoît Jacquot.
Benoît Jacquot réussit le tour de force de faire de ces jours historiques des débuts de la Révolution une miévrerie sans nom, ni souffle. Un échec sur tout la ligne.
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Pierre Arditi, sublimé (et ça faisait un bail
qu'on attendait ça). |
Meilleur film: Vous n'avez encore rien vu
Meilleur réalisateur: Wes Anderson
Meilleur acteur: Pierre Arditi, Vous n'avez encore rien vu
Meilleur actrice: Olivia Colman, Tyrannosaur
Révélation masculine: Manu Payet, pour Radiostars et Les Infidèles
Révélation féminine: Tara Lynne Barr, pour God bless America