31 juillet 2013

"Titanic" : une exposition qui est tout sauf un naufrage

Le Titanic s'expose au parc des expositions. Un savant et subtil mélange de reconstitution et de vrais objets, venus du fond de l'océan. Soit une émotion forcément au rendez-vous. Une belle surprise.

 
L'exposition Toutankhamon, au même endroit en 2012, était déjà surprenante. Agréablement surprenante. Celle consacrée au Titanic est mieux encore. Essentiellement parce que les objets exposés sont des "vrais", directement venus du fond de l'océan, quand il ne s'agissait pour le Pharaon que de reconstitutions.
Dans le lot, quelques babioles qui, si elles n'étaient liées à l'un des drames les plus fameux de l'histoire, ne seraient rien, bien sûr - valves de baignoire, robinets d'eau froide et d'eau chaude ou rivets de la coque. Mais des bijoux, aussi, pendentifs et chaînes en or, objets bien plus personnels. Donc d'autant plus chargés d'émotion.
 
2228 passagers, 1523 morts
 
Et puis cette valise, surtout. Cette vieille et belle valise, rongée par les eaux, mais rescapée des flots. On imagine le destin, tragique, de son propriétaire. Plus loin, le clou du spectacle. Un costume complet, pantalon et veston, récupéré dans une malle. De quoi donner des frissons au plus insensible des hommes.
D'autant que la mise en scène, pour un endroit pas des plus faciles à exploiter - le très froid et impersonnel parc des expositions de la Porte de Versailles - est parfaitement réussie. Une reconstitution habile de ce que fut le Titanic.
Il faut juste passer la première salle, décevante, avec ses panneaux explicatifs et ses onze premières étapes de l'audioguide, censés mettre dans le contexte des années 1900. Cela ne sert à rien, sinon à rallonger, artificiellement, la durée de la visite.
Veston, retrouvé dans l'eau.
Le reste, fort heureusement, permet de se laisser emporter par l'histoire du Titanic. 269 mètres de long, 2228 passagers à bord, 1523 morts pour seulement 705 rescapés après son naufrage dans la nuit du 14 au 15 avril 1912.
 
Reconstitution fidèle
 
On fait d'abord connaissance avec les 49 Français qui se trouvaient à bord. Puis on s'apitoie sur le sort du commandant Smith. Chaque catastrophe à ses losers magnifiques, ces filles et ces gars qui n'auraient pas dû être là, mais le furent quand même. Foutu farceur, parfois, que le destin...
Smith a 62 ans, déjà. Il a été de toutes les campagnes de la White Star Line, la compagnie qui a fait construire le Titanic. Il aurait dû prendre sa retraite l'année précédente, mais le Titanic, le plus grand paquebot du monde, cela ne se refuse pas. Sa femme Eleanor râle bien un peu. Elle le voudrait à la maison, son cher mari. Il lui fait une promesse, en guise de compromis. Ce sera, promis, juré, sa dernière traversée. Il ne croyait pas si bien dire...
Le Titanic quitte Southampton le 10 avril 1912. Après une dernière escale à Cherbourg, il vogue tout droit vers New York. Et nous aussi, spectateurs que nous sommes, plus d'un siècle plus tard. On passe un petit pont, et se trouve dans le cœur du navire. La reconstitution, fidèle, d'un couloir avec ses portes de cabines.
Cabines de troisième classe.
 
Un bateau pas très écolo
 
Comptez 2.500 dollars de l'époque (soit gentiment pas loin de 60.000 dollars actuels) pour une première classe. Quant aux suites, c'est 4.500 dollars, la bagatelle de 100.000 dollars d'aujourd'hui... La troisième classe, c'est moins cher évidemment, mais pas donné quand même: 40 dollars. A ce prix là, on partage sa cabine avec quatre personnes. La plupart du temps, on ne les connaît pas. Mais les voyages sont aussi fait pour cela après tout, même si on est assez loin, ici, de quelconques considérations touristiques. Il s'agit plutôt, pour l'essentiel, d'émigrer vers les Etats-Unis.
On est avec ces pauvres gens, d'ailleurs, maintenant, à voir les lits dans lesquels ils dorment - 100% reconstitution ici, évidemment. Couvre-lit White Star en prime. On traverse un couloir aux rythmes des moteurs que l'on entend ronronner. 159 fourneaux à charbon qui tournent à plein régime pour alimenter les 29 chaudières du bateau. Le Titanic brûlait 1,5 kilo de charbon pour chaque mètre parcouru... Pas franchement écolo, mais la nature s'est bien vengée.
 
A voir jusqu'au 15 septembre.
C'est un peu cher, dommage,
mais ça vaut le coup.
Iceberg droit devant
 
Le drame se noue dans la nuit du 14 au 15 avril 1912. Les vigies, Frederick Fleet et Reginald Lee, sont à leur poste. Mais sans jumelles. On les a perdues et n'arrive plus à remettre la main dessus... Soudain, une masse noire, droit devant. Fleet saisit la corde de la cloche et sonne par trois fois. Il prévient ensuite le commandant par téléphone. "Iceberg droit devant".
La suite est connue, bien sûr. On la redécouvre pourtant sans déplaisir dans une semi-obscurité qui met dans l'ambiance. La température de l'eau à de -2°C. Si bien que la plupart des victimes sont mortes d'hypothermie, plutôt que noyées. Il paraît que c'est moins pire... Les musiciens qui jouent, jusqu'au bout. "Les femmes et les enfants d'abord", mais ça ne vaut pas vraiment pour tout le monde...
L'exposition insiste sur les héros, elle a bien raison. Comme Ida Strauss, épouse de son cher Isidor, propriétaire du grand magasin Macy's. "Personne ne me séparera de mon mari, clame-t-elle sans trembler. Nous mourrons comme nous avons vécu. Ensemble".
Hop, fermez le ban. Voile pudique sur drames intimes. La salle suivante est celle de la renaissance. Nous sommes le 1er septembre 1985. Voilà 73 ans que l'on a perdu le Titanic. On le retrouve par 3.800 mètres de fond.
 
De l'émotion avec des plats à gratin, eh oui.
La redécouverte de 1985
 
On imagine l'émoi de ses "découvreurs". Ils remontent plus de 5.500 objets. Certains sont ici, sous nos yeux. Présentés comme on les a vus la première fois avec, c'est une chouette bonne idée, la photo de leur découverte, au fond de l'eau, qui en témoigne. Emotion garantie avec ces plats à gratin - oui, je sais, "émotion" et "plat à gratin", on a du mal à imaginer que ça puisse aller ensemble, mais c'est pourtant le cas.
Tous alignés, à moitié enfouis dans le sable. On s'interroge, se demandant par quel miracle, alors que le bateau a fait naufrage, on les voit si bien rangés. L'explication est simple: le bois du placard dans lequel ils se trouvaient a pourri, lui, et disparu. Ne restent que ces plats à gratin, symboles parfait de la vie quotidienne, routinière, qui a basculé une nuit d'avril 1912.
 
Titanic, l'exposition
Parc des exposition, porte de Versailles
Paris
Jusqu'au 15 septembre 2013

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