07 janvier 2012

"Les crimes de Snowtown": le gang des barbares australien

A l'origine, une histoire vraie. C'est bon de le préciser, tant on n'a franchement pas envie d'y croire, tellement c'est dur, noir. Jamie, 16 ans, habite avec sa mère et ses frères dans une ville en déshérence sociale. Les occasions de sourire sont rares. Un certain John Bunting, bon vivant et malicieux, débarque dans leur vie. Jamie tombe sous le charme et, attention, roulement de tambours, c'est là que ça devient intéressant, "mettra du temps à comprendre que son mentor est un tueur en série, le plus dangereux qu’ait connu l’Australie."
En tout, une bonne dizaine de crimes, tous plus atroces les uns que les autres. Heureusement, le film évite de se vautrer trop dans le voyeurisme et la violence gratuite. Une scène, quand même, que l'on qualifiera pudiquement de "difficile" vient plonger le spectateur au coeur des raffinements réservés aux victimes. Sans spoiler outre mesure (ce serait dommage), disons juste que ladite victime, attachée dans une baignoire, n'est pas jolie à voir à la fin. Et que la mise à mort est longue, très longue: des étranglements successifs, sept au total, avec John, en pervers psychopathe, qui donne le rythme des étreintes et des relâchements, à coups de "stop" et de "again"...
Mais voilà que j'en ai déjà quasi trop dit! Limite, même, si je ne m'étale pas trop sur cette violence qui, encore une fois, est loin d'être le moteur du film. Les Crimes de Snowtown se veut avant tout un drame psychologique. Avec, en toile de fond, cette interrogation majeure: comment Jamie, ado tout ce qu'il y a plus classique, se laisse entraîner dans des horreurs atroces?
C'est là un peu d'ailleurs la faiblesse du film: ce ressort psychologique n'est pas forcément bien exploité. On a parfois du mal à suivre le cheminement de Jamie; encore plus à comprendre le point de bascule. Certes, John, son beau-père, se montre charismatique, et la pression psychologique qu'il exerce sur lui est forte, mais cela, on le déduit plus qu'on ne le voit. J'aurais aimé que le scénario insiste davantage sur les rapports John/Jamie, qui sont de domination et de fascination.
De même, si l'on suit le parcours meurtrier de John, on ne sait rien sur ses motivations profondes. Quelle terrible faille est-elle enfouie en lui, permettant d'expliquer, un tant soit peu, pourquoi derrière un gros nounours barbu, aux yeux rieurs et gentils (un excellent Daniel Henshall dans le rôle), se cache un assassin pervers, messianico-machiavélique, dont le but, dans la vie, est de nettoyer la ville de ses rebuts? "Ce n'est pas barbare de buter des détraqués", dit-il à un moment.
Tout est donc susceptible de passer sous sa main de criminel, à commencer par les "pédés" ("fag" en VO) et les pédophiles. Avec, d'ailleurs, à ce propos, sur une bonne première demi-heure du film, un malaise initial, tant homosexualité et pédophilie sont de prime abord embarqués dans un même amalgame. Mais, après tout, il est délicat de demander à des criminels dingues de bien faire la distinction... Très vite, de toute manière, John et sa clique élargissent leur champ d'action aux drogués et aux malades, bref, à tout ce qui sort du rang. Comme ce type au python, un peu simplet, sacrifié "parce qu'il lui manque une case"...
Un film sur la folie, donc. Un film sur les dangers de la loi du Talion et des comités d'autodéfense s'érigeant en justiciers. Les scènes les plus intéressantes sont d'ailleurs celles sur ces soirées regroupant régulièrement quelques-uns des membres de la communauté, venus pérorer sur ce qu'il conviendrait de faire pour débarrasser la ville de sa "racaille." Untel est un exhibitionniste? "Y a qu'à lui couper la bite et la lui faire bouffer", suggère l'un. "Oui, et lui enfoncer une bougie dans le cul avant de l'allumer!", renchérit un deuxième. Vous voyez le genre... Des paroles, bien sûr. Sauf que John Bunting, lui, passe des paroles aux actes, franchissant allègrement la barrière séparant le bien du mal.

PS: Puisqu'il s'agit d'un film tiré d'un fait divers authentique, autant renvoyer vers quelques liens sur l'affaire criminelle: la vraie histoire de John Bunting, arrêté en 1999 et condamné à la prison à vie, et ses petits copains.

Bilan: On peut s'en passer - Moyen - A voir! -Excellent - Attention, futur grand classique.
Note: 10/20

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