Le labyrinthe du silence est un film sur le devoir de mémoire... Celui de tout un peuple, dans les années 1950 et 60, qui ose ôter ses oeillères et affronter son passé. Auschwitz. L'extermination de masse. L'histoire vraie d'un procureur allemand face à des questions qui le dépassent.
Mengele est mort de sa belle mort au Brésil, en 1979. Enfin "belle"... Noyé, quand même, c'est déjà ça, mais nullement inquiété par la justice. Le sinistre médecin d'Auschwitz n'a jamais eu à répondre de ses actes. Il faut se souvenir de ça. De ces nazis en fuite, couverts et protégés par tant de personnes après 1945.
Comme il faut se souvenir, aussi, que le "devoir de mémoire", lâchons les grands mots, est un combat de tous les jours. Qu'il est difficile, et ô combien, de faire ce travail. Difficile, pour un peuple, d'accepter ses faiblesses et ses errements autant que ses grandeurs.
Le vrai héros pas assez bankable ?
Ce Labyrinthe du silence revient sur toutes ces questions, à propos de l'Allemagne des années 1950 et 60, plus avide de croissance économique que d'autocritique. Nous sommes en 1958 et un jeune procureur, ignorant tout d'Auschwitz et de ses drames, se lance, sous la houlette d'un journaliste anar, à faire des recherches sur le camp, ses bourreaux et ses victimes. Son travail aboutira au procès de Francfort, entre 1963 et 1965, le premier sur l'égide du gouvernement allemand libre et démocratique, jugeant 22 prévenus ayant servi à Auschwitz.
Une histoire vraie, donc, bien qu'à notre goût ici bien trop romancée. Par exemple, le personnage phare du film, Johann Radmann (joué par Alexander Fehling) n'a jamais existé. Il est issu d'un mélange de trois procureurs ayant travaillé sur ce dossier. C'est un raccourci un brin audacieux. Et décevant, surtout.
Quoi donc, alors ? Fritz Bauer, principal "meneur" du procès de Francfort dans la réalité, était-il trop vieux pour faire un héros crédible ? La véracité historique doit-elle s'effacer pour plaire à la ménagère, en lui offrant en pâture un beau gosse blond et musclé ? Le vrai Fritz Bauer avait, au moment de son enquête, dépassé les 55 ans. Plus bankable, visiblement, car on le retrouve ici relégué à un rôle secondaire...
Vous avez demandé Mad Men, ne quittez pas. |
Croiser un vieillard allemand c’est se demander ce qu’il
faisait pendant la guerre
Passons sur ce qui n'est finalement qu'un détail et revenons-en au coeur du sujet. On a d'abord envie de dire que, heureusement, ce film est allemand. Heureusement pour eux, s'entend. Non parce qu'il est dur, le propos. Franchement pas tendre. Et que, par exemple, on aurait sans doute un peu de mal à ce que Hollywood s'empare de Vichy avec un côté donneur de leçon comme ce Labyrinthe n'hésite pas à le faire.
C'est bien simple, on en revient presque à cette vieille "blague" voulant qu'autrefois, quand on allait en Allemagne, on ne pouvait croiser un vieux sans se demander ce qu'il avait bien pu commettre comme horreurs pendant la guerre. Evidemment, ces vieux-là, maintenant, ne traînent plus beaucoup les rues. Tout juste un peu les maisons de retraite, encore.
Mais on a bien cela, dans ce film. Toute une génération d'Allemands, ceux nés dans les années 30, qui se retrouve, trente ans plus tard, à devoir s'interroger sur ses parents. Le héros, Radmann, a bien du mal à s'en remettre. Il lui faut accepter le passé. Son passé, même s'il n'y est pour rien. Sur cette question du rapport qu'un peuple doit avoir à sa mémoire, on a parfois du mal à suivre le propos.
Non que ce ne soit pas important, surtout pas, mais parce que remuer tout cela est dangereux. Disons, plutôt, que ce n'est pas si simple. Oui, un peuple peut basculer, sombrer. Oui, il faut le savoir, en avoir conscience, pour ne pas que ça recommencer. Mais, pour autant, ce n'est pas une nation qu'on doit juger, ce sont toujours des hommes.
Friederike, notre future épouse. |
Friederike Becht, on t'aime
Et là, quand il s'agit des hommes, oui, on suit, on applaudit et on s'émeut à regarder ce Labyrinthe du silence, capable de nous tirer des larmes à mesure que la vérité éclate, que les victimes osent enfin parler. Que les bourreaux, surtout, sont justement condamnés. Honnis. Sauf Mengele, malheureusement, sauf Mengele...
D'un point de vue cinématographique, c'est un peu aride. Mais le sujet historique, lui, est fascinant. La fougue du jeune procureur Radmann, incarné par Alexander Fehling, fait plaisir à voir. Le premier, il comprend qu'on ne construit une vraie démocratie que si l'on refuse de se mettre des oeillères. Et tant pis si ça doit d'abord faire mal, remuer de sales choses. A terme, c'est salvateur. Alors il y va, il fonce le p'tit Johann, et c'est beau à voir. Mais plus beau encore est de voir la belle Marlene, jouée par Friederike Becht. Friederike, si tu passes par là, je t'aiiiiiiiiime.
Bilan : On peut s'en passer - Moyen - A voir - Excellent
Note : 12/20
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